Vue de gratte-ciels modernes sous un coucher de soleil doré.

Dans quel délai peut-on opter pour l’IP Box ?

Selon le tribunal administratif de Lyon, l’option pour le régime spécial d’imposition des revenus tirés de la propriété intellectuelle et industrielle peut être effectuée dans le délai de réclamation.

Cet article a été rédigé par Etienne Durieux et Nicolas Ménard et paru dans Option Finance le 25 février 2025.

Cette décision, qui s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence du Conseil d’État1, réaffirme le principe selon lequel une disposition légale exigeant que le bénéfice d’un avantage fiscal soit demandé par voie déclarative ne prive pas automatiquement le contribuable du droit de régulariser sa situation ultérieurement.

Cette interprétation permet ainsi d’éviter qu’une simple omission déclarative n’entraîne la perte définitive d’un avantage fiscal en particulier lorsque aucune disposition légale expresse ne prévoit cette déchéance.

L'affaire Nidec ASI : une illustration concrète de l'application de ce principe

En l’espèce, la société Nidec ASI avait développé un progiciel dont elle tirait des revenus de concession. La société n’avait pas initialement opté, dans sa déclaration, pour le régime de faveur de l’IP Box et avait donc été imposée sur ces revenus au taux de droit commun de l’impôt sur les sociétés et non au taux réduit de 10 %.

Pour rappel, le régime de l’IP Box permet en effet aux entreprises soumises à l’IS d’opter, sous conditions, pour une imposition séparée au taux réduit de 10 % du résultat net tiré de la cession, de la concession ou de la sous-concession de brevets et d’actifs incorporels assimilés (parmi lesquels figurent les logiciels protégés par le droit d’auteur)2.

Le 30 décembre 2022, la société a déposé une réclamation contentieuse visant à obtenir l’application de ce régime au titre des exercices 2020 et 2021. L’administration fiscale a rejeté cette demande, estimant que l’option devait impérativement être exercée dans la déclaration de résultats initiale, excluant toute possibilité de régularisation a posteriori.

Le Tribunal administratif de Lyon a toutefois donné raison à la société, en considérant que l'absence d'exercice de l'option dans la déclaration de résultats ne la privait pas du droit de solliciter le bénéfice de ce régime préférentiel au moyen d’une réclamation.

  • Dans son jugement, le Tribunal administratif reprend le considérant de principe des jurisprudences Sicli et Lanet3, en réaffirmant que le fait que le bénéfice d'un avantage fiscal soit demandé par voie déclarative n’a, en principe, pas pour effet d'interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales (LPF) et qu’il n’en va autrement que dans les cas où la loi :
    • Soit prévoit que l'absence de demande dans le délai de déclaration entraîne la déchéance du droit à cet avantage ;
    • Soit offre au contribuable une option entre différentes modalités d'imposition dont la mise en œuvre impose nécessairement qu'elle soit exercée dans un délai déterminé.

En l'espèce, la juridiction permet à la société de solliciter l’application de l’IP Box a posteriori en considérant que ce dispositif n’entrait dans le champ d’aucune de ces exceptions dès lors que :

  • L’article 238 du CGI ne prévoit aucune déchéance sanctionnant l’absence d’option dans la liasse ;
  • Le bénéfice de ce régime n’impose pas que l’option soit exercée dans un délai spécifique.  

Un jugement faisant écho à d’autres décisions favorables

Ce jugement s’inscrit dans une tendance jurisprudentielle plus large, favorable aux contribuables.

Il fait écho à d'autres décisions rendues par le Conseil d’État, notamment sur le régime mère-fille4, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE)5, le suramortissement Macron (CGI, art. 39 decies)6, ou encore le report en arrière des déficits (« carry-back »)7.

Dans chacune de ces situations, le Conseil d’État a permis d’en demander le bénéfice par voie de réclamation, esquissant un cadre juridique permettant aux entreprises de rectifier postérieurement leurs erreurs déclaratives.

Une opportunité de réclamation pour les entreprises

Si la solution ici retenue doit encore être confirmée, elle incite, dès à présent, les entreprises qui n’auraient pas initialement opté pour ce dispositif à déposer une réclamation dans le délai prévu par l’article R. 196-1 du LPF afin d’en bénéficier et d’obtenir, en conséquence, le remboursement d’une fraction de l’impôt sur les sociétés acquitté. En pratique, en matière d’impôt sur les sociétés, ce délai expire le 31 décembre de la deuxième année suivant la date de paiement de l’impôt contesté ; soit, par exemple, le 31 décembre 2025 pour un exercice clos le 31 décembre 2022 dont le solde d’IS a été versé en 2023.

Ce qu'il faut retenir

Au regard de la possibilité offerte par le tribunal administratif de Lyon, les entreprises qui n’ont pas opté pour l’application du régime spécial d’imposition des revenus des brevets à l’occasion de leur déclaration de résultats devraient déterminer l’opportunité ou non pour elles de réclamer le bénéfice de ce régime avant le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de paiement de l’impôt sur les sociétés dont elle voudrait obtenir le remboursement partiel.


A propos de cet article