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Rupture conventionnelle : nouveaux apports jurisprudentiels

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La Cour de cassation a apporté des précisions sur le dol et la validité de la procédure d’homologation de la rupture conventionnelle.

La rupture conventionnelle homologuée est un mode de rupture particulier du contrat de travail d'un salarié à durée indéterminée. Introduit en 2008 et figurant aux articles L1237-11 à L1237-16 du Code du travail, ce nouveau mode de rupture a rencontré un succès important lié à sa procédure reposant sur l’accord entre l’employeur et le salarié ainsi qu’une homologation à bref délai par l’autorité administrative.

Des garanties encadrent ce mode de rupture du contrat de travail qui suppose le consentement de libre et éclairé des parties et le respect de la procédure en plusieurs étapes. La Cour de cassation a récemment apporté des précisions d’importance.

Dans une première affaire (n°23-10.817), la Cour Suprême a fait produire les effets d’une démission à une rupture conventionnelle jugée nulle pour dissimulation frauduleuse du salarié d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’employeur. Dans cette affaire, l’employeur avait accepté de conclure une rupture conventionnelle avec un responsable commercial, sur le fondement de sa future reconversion professionnelle dans le management. Le salarié avait en réalité un projet d’entrepris dans le même secteur d’activité auquel deux anciens salariés étaient associés. Faisant droit à la demande en nullité de l’employeur, la cour d’appel a jugé que le salarié a vicié la rupture conventionnelle par des manœuvres dolosives. Le salarié s’est pourvu en cassation et a fait valoir qu’en l’absence de clause de non-concurrence, il n’était pas tenu de révéler spontanément à son employeur son projet de création d’activité concurrente.

La Cour de cassation a confirmé la décision de la cour d’appel, rappelant que selon l’article 1137 du Code civil, (dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018), constitue un dol, la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. La Cour a donc approuvé la cour d’appel d’avoir estimé, sans faire peser sur le salarié une obligation d’information contractuelle, ni porter atteinte à sa liberté d’entreprendre, que le consentement de l’employeur avait été vicié. Elle a jugé que cette rupture conventionnelle était nulle et a précisé que « lorsque le contrat de travail est rompu en exécution d’une convention de rupture ensuite annulée en raison d’un vice du consentement de l’employeur, la rupture produit les effets d’une démission ».

Dans une seconde affaire (n°22-23.143), la Cour de cassation a validé l’homologation d’une rupture conventionnelle homologuée par l’administration après des explications complémentaires données par l’employeur, suite à un premier refus de la part de l’autorité administrative et sans avoir à recommencer la procédure.

Il s’agissait d’une vendeuse, accidentée du travail, ayant été reconnue le 9 décembre 2019 par le médecin du travail, apte sous réserves (temps partiel et port de charges limité) et qui avait refusé le poste à temps partiel proposé. Une rupture conventionnelle a finalement été conclue le 22 juillet 2020, dont la salariée a demandé en justice l’annulation au motif que l’employeur n’aurait pas recommencé la procédure à la suite de demandes de précisions de la part de l’autorité administrative sur le montant des salaires et de s’être dispensé de respecter les délais légaux.

La Cour de cassation n’a pas retenu l’argumentation de la salariée : « La cour d'appel, qui a constaté que l'autorité administrative avait déclaré irrecevable la demande d'homologation de la convention de rupture au regard du montant des salaires mentionné dans le formulaire de rupture et relevé que l'employeur n'avait pas recommencé la procédure après cette décision mais avait donné des explications à l'administration sans modifier les montants de salaires indiqués initialement, ces observations ne nécessitant pas une telle modification, en a exactement déduit que les formalités substantielles de la rupture avaient été respectées ». Ainsi, la rupture du contrat de travail a été validée par l’homologation de la convention, sans avoir à recommencer la procédure.

La Cour de cassation a précisé l’importance du respect des conditions de validité de forme et de fond de la rupture conventionnelle du contrat de travail homologuée par l’autorité administrative.

Rappelons en effet que le succès de ce mode de rupture introduit dans le droit du travail français depuis près de 15 ans ne se dément pas : le nombre de ruptures conventionnelles était de 284.234 en 2012 pour s’élever à 503.526 en 2022. Ce dispositif est pérenne selon la Ministre du Travail qui dans une déclaration du 8 février 2024 a indiqué que « ce dispositif a fait ses preuves et il n'est pas question de toucher à ce dispositif qui fait partie de la relation bien comprise entre l'entreprise et le salarié ».

Ce qu'il faut retenir

La Cour de cassation apporte deux précisions : une rupture conventionnelle viciée produit les effets d’une démission ; un complément d’informations évite de recommencer la procédure d’homologation.

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