EY désigne l’organisation mondiale des sociétés membres d’Ernst & Young Global Limited, lesquelles sont toutes des entités juridiques distinctes, et peut désigner une ou plusieurs de ces sociétés membres. Ernst & Young Global Limited, société à responsabilité limitée par garanties du Royaume-Uni, ne fournit aucun service aux clients.
L'accompagnement d'EY
-
Our transaction law team offers detailed legal advice and support to help you reach your goals quickly, efficiently and with added value. Learn more.
Lire plus
1. Une liste des opérations d’investissement complétée
Pour mémoire, les opérations d’investissement pouvant être concernées par la réglementation des IEF sont définies à l’article R.151-2 du code monétaire et financier lequel vise (i) l’acquisition du contrôle d’une entité de droit français, (ii) l’acquisition de tout ou partie d’une branche d’activité d’une entité de droit français, (iii) le franchissement de seuil, direct ou indirect, seul ou de concert, de 25% de détention des droits de vote d’une entité de droit français.
Le décret du 28 décembre 2023 complète cette liste à deux niveaux.
- En premier lieu, la prise en compte des investissements étrangers portant sur les succursales en France de sociétés de droit étranger :
Le 1° de l’article R. 151-2 du code monétaire et financier est complété. Est maintenant également considéré comme un investissement, l’acquisition du « contrôle […] d’un établissement immatriculé au registre du commerce et des sociétés en France ». Cette disposition ne vise donc plus uniquement l’acquisition du contrôle des « entités » de droit français.
Si la notion d’« entité de droit français » n’était pas définie et devait s’entendre largement selon les lignes directrices de la direction générale du Trésor¹, la question pouvait toutefois se poser de la prise en compte de succursales en France de sociétés étrangères : lesdites lignes directrices précisaient que les succursales ne devaient pas être considérées comme des entités de droit français. En conséquence, « une opération d’investissement au sens de l’article R.151-2 du code de commerce sur une telle succursale [n’était] pas soumise au contrôle des IEF ».
La modification opérée par le décret du 28 décembre 2023 viserait à remédier à cette situation. Comme le précise le communiqué de presse de la Direction générale du Trésor², il s’agit « de se prémunir d’éventuelles stratégies de contournement de la réglementation IEF. ».
Ainsi, serait soumise au dispositif des IEF la prise de contrôle, par un investisseur étranger, d’une entité de droit étranger ayant une succursale en France dès lors que celle-ci exerce une activité considérée comme sensible. En revanche, il convient de noter que le 2° de l’article R.151-2 n’a pas été modifié alors qu’il concerne l’acquisition d’une branche d’activité : seules les entités de droit français restent, pour l’instant, visées.
- En second lieu, la pérennisation du franchissement de seuil intéressant les sociétés cotées :
Consécutivement à la crise sanitaire, un décret n°2020-892 du 22 juillet 2020³ a introduit un dispositif ad hoc et temporaire afin d’encadrer les investissements étrangers en cas de franchissement du seuil de détention de 10% des droits de vote d’une société cotée de droit français⁴ intervenant dans un secteur sensible. Cette mesure a été prorogée à plusieurs reprises⁵ et devait expirer le 31 décembre 2023.
Le dispositif est pérennisé : l’article R.151-2 est complété par un 4° prévoyant que constitue également un investissement au titre de la réglementation des IEF, le fait pour un investisseur étranger de « franchir, directement ou indirectement, seul ou de concert, le seuil de 10 % de détention des droits de vote d'une société de droit français dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé. ».
A l’instar du dispositif ad hoc antérieurement applicable, il s’agit toujours d’une procédure de contrôle allégée. En effet, l’investisseur étranger est dispensé de la demande d’autorisation : le projet d’investissement doit faire l’objet d’une notification préalable au ministre de l’Economie⁶ et sauf opposition de ce dernier, la dispense de demande d’autorisation naît à l’issue d’un délai de 10 jours ouvrés à compter de la notification⁷.
Par ailleurs, ce contrôle n’est requis que si l’investissement est réalisé par un investisseur étranger non européen⁸.
2. L’élargissement des secteurs concernés par la réglementation des IEF
L’article R. 151-3, II du code monétaire et financier est modifié afin d’inclure, parmi les activités sensibles, l’exercice des missions de sécurité des établissements pénitentiaires ainsi que « l’intégrité, la sécurité ou la continuité de l’extraction, de la transformation et du recyclage de matières premières critiques. ».
En outre, la photonique et les technologies intervenant dans la production d'énergie bas carbone⁹ font désormais partie de la liste des technologies critiques prévues par l’arrêté relatif aux investissements étrangers¹⁰ : en conséquence, seront considérées comme sensibles les activités de recherche et développement dans ces technologies critiques dès lors qu’elles sont destinées à être mises en œuvre dans l'un des secteurs de la réglementation des IEF.
3. Une redéfinition des cas de dispense
L'article R. 151-7, I du code monétaire et financier prévoyait plusieurs cas de dispense à la demande d’autorisation au titre de la réglementation des IEF :
- L’investissement intra-groupe réalisé entre des entités appartenant toutes au même groupe c’est-à-dire détenues à plus de 50% du capital ou des droits de vote par le même actionnaire ;
- Le franchissement de seuil de 25% de détention des droits de vote alors que l’investisseur étranger avait acquis antérieurement le contrôle de l’entité concernée et bénéficiait déjà d’une autorisation au titre de la réglementation des IEF ;
- L’acquisition du contrôle d’une entité alors que l’investisseur étranger avait franchi antérieurement le seuil de détention de 25% des droits de vote et bénéficiait déjà d’une autorisation¹¹ à ce titre.
Le I de l’article R.151-7 est réécrit et prévoit désormais plus laconiquement que : « L’investisseur est dispensé de la demande d’autorisation […] lorsque l’investisseur en dernier ressort dans la chaîne de contrôle, […], avait antérieurement à l’investissement, déjà acquis le contrôle, au sens de l’article L.233-3 du code de commerce. ». Selon la notice du décret du 28 décembre 2023, il s’agit d’une mesure de « simplification en matière d'exemptions pour les réorganisations intra-groupe ».
Cette nouvelle rédaction ne devrait néanmoins plus permettre de faire jouer le dernier cas de dispense antérieurement prévu c’est-à-dire l’acquisition du contrôle d’une entité alors que l’investisseur étranger avait déjà franchi le seuil de détention de 25% des droits de vote et qu’il bénéficiait déjà d’une autorisation au titre de la réglementation des IEF.
Enfin, précisons que les exceptions applicables au cas de dispense demeurent, quant à elles, inchangées¹².
4. Une dématérialisation du dépôt des demandes
En octobre 2023, la direction générale du Trésor annonçait la création de la « Plateforme IEF » comme « voie dématérialisée de dépôt des demandes d’autorisation et des demandes d’examen préalable ».
L’arrêté du 31 décembre 2019 relatif aux investissements étrangers a été modifié en conséquence par l’arrêté du 28 décembre 2023. En effet, l’article 5 de l’arrêté du 31 décembre 2019 prévoit maintenant que la transmission des demandes d’autorisation et des demandes d’examen préalable¹³ à la direction générale du Trésor est réalisée par le téléservice accessible sur le site internet plateforme-ief.dgtresor.gouv.fr.
En outre, la notification prévue au titre du dépassement du seuil de 10% pour les sociétés cotées de droit français, la déclaration obligatoire prévue dès la réalisation de l’investissement autorisé¹⁴ ou toute correspondance relative aux IEF sont à adresser par voie électronique à l’adresse suivante : iefautorisations@dgtresor.gouv.fr.
En conséquence, la transmission par voie postale est désormais écartée quel que soit l’objet de la demande.