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Article co-rédigé avec Tatiana Leyinda
Le 7 septembre dernier¹, la Cour de cassation s’est prononcée, pour la première fois, sur la possibilité pour un preneur exploitant de locaux à usage de résidences de tourisme, de résilier son bail à chaque échéance triennale après le renouvellement de celui-ci.
Pour rappel, l’article L. 145-7-1 du Code de commerce, introduit par le législateur en 2009², prévoit à titre dérogatoire, une durée « ferme » de neuf ans minimum pour les baux commerciaux signés entre les propriétaires de murs et les exploitants de locaux à usage de résidences de tourisme, sans possibilité de résiliation par le preneur à l’expiration d’une période triennale.
Ce texte s’applique aux résidences de tourisme classées qui relèvent de l’article L. 321-1 du Code de tourisme. Elles doivent répondre à la définition de l’article D. 321-1 du même Code c’est-à-dire faire l'objet d'une exploitation permanente ou saisonnière et être constituées d'un ou plusieurs bâtiments d'habitation individuels ou collectifs regroupant, en un ensemble homogène, des locaux d'habitation meublés à usage d’une clientèle touristique et des locaux à usage collectif.
Historiquement, cette disposition dérogatoire au droit commun des baux commerciaux a été introduite pour répondre à un besoin de sécurité juridique du bailleur au regard des avantages fiscaux³ qu’il tient de la location pendant neuf années à un exploitant de résidences de tourisme.
Les Hauts magistrats avaient eu l’occasion de préciser⁴ que l’article L. 145-7-1 du Code de commerce s’appliquait immédiatement aux baux en cours au jour de son entrée en vigueur en prenant le soin d’ériger ce texte en disposition d’ordre public. Cependant, une question n’avait jusqu’à maintenant pas été tranchée : celle de savoir si l’article L.145-7-1 susvisé était applicable au bail renouvelé.
Dans l’affaire commentée, le bail commercial de locaux à usage de résidences de tourisme avait été renouvelé à compter du 1er octobre 2012, après un bail initial de neuf ans.
Le preneur a donné congé au bailleur le 20 mars 2015 pour le 30 septembre 2015.
En suite d’une assignation en nullité du congé par le bailleur, les juges du fond⁵ ont fait droit aux arguments du preneur en considérant que le congé avait été régulièrement délivré pour la fin de la première période triennale.
Saisie par un pourvoi du bailleur faisant valoir que l’article L.145-7-1 ne distinguait pas entre baux initiaux et baux renouvelés et devait, en conséquence, s’appliquer y compris aux baux renouvelés, la Cour de cassation constate, en préambule, que l’article L.145-7-1 du Code de commerce n’apporte aucune précision quant à l’impossibilité de résilier le bail renouvelé à l’expiration de chaque période triennale.
Pour trancher cette question, la Cour de cassation se fonde, d’une part, sur les travaux parlementaires et le but poursuivi par le législateur à savoir la pérennisation d’un bail d’une durée minimale de neuf ans comme rappelé ci-dessus, et d’autre part, sur les dispositions d’ordre public⁶ de l’article L.145-12 du Code de commerce relatif à la durée des baux renouvelés.
En effet, ce texte dispose que les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 145-4 relatifs à la possibilité pour le preneur de donner congé à l’expiration d’une période triennale, sont applicables aux baux renouvelés.
Elle en déduit qu’il y a lieu de faire application des seules dispositions de l’article L.145-12 et que le droit de résiliation triennale du preneur s’applique, en conséquence, au bail renouvelé de locaux à usage de résidences de tourisme.
Bien qu’inédit, il est intéressant de noter que cet arrêt permet d’apporter un éclairage précis sur une problématique jusqu’alors jamais tranchée : en pratique, la solution de la Haute Cour offre la faculté aux preneurs de locaux à usage de résidences de tourisme de résilier leur bail renouvelé dès l’expiration de la première période triennale.