Par un arrêt publié au bulletin en date du 11 janvier 2023, la Cour de cassation apporte une précision particulièrement importante.
Dans un contentieux relatif aux relations commerciales entre un constructeur de maison individuelle et ses sous-traitants, le ministre de l’économie considérait que la pratique consistant notamment à déduire des factures des sous-traitants une remise systématique de 2% au titre du CICE contrevenait aux dispositions du code de commerce prohibant les avantages sans contrepartie (i.e. pratique visant à obtenir ou tenter d’obtenir « d'un partenaire commercial un avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu »). L’action du ministre n’était donc pas fondée sur l’interdiction du déséquilibre significatif.
La Cour de cassation juge que les dispositions applicables au cas d’espèce exigeaient seulement que soit constatée l'obtention ou la tentative d'obtention d'un tel avantage sans contrepartie, quelle que soit la nature de cet avantage, y compris donc en cas de réduction de prix. Cet élément semble constituer l’apport essentiel de cet arrêt : la Cour de cassation pourrait ainsi ouvrir les possibilités de contestation des réductions de prix au travers de la pratique restrictive de concurrence des avantages sans contrepartie et ce, au-delà même du déséquilibre significatif qui suppose la démonstration de l‘existence d’une soumission du partenaire commercial.
Ainsi, elle casse la décision de la cour d'appel qui avait retenu une approche restrictive en considérant que « lorsque le prix n'a pas fait l'objet d'une libre négociation, son contrôle judiciaire ne s'effectue pas en dehors d'un déséquilibre significatif ».
En d’autres termes, le contrôle du prix pourrait intervenir sur le fondement du déséquilibre significatif à la condition de démontrer l’existence d’une soumission, et hors ce contexte de soumission, sur le fondement de l’interdiction de l’avantage sans contrepartie, c’est-à-dire dans le cadre de contrats ayant été librement négociés.
Bien que les faits de l’affaire étaient soumis aux dispositions de l’article L.442-6 du code de commerce ancien, la solution devrait s’appliquer aux relations commerciales soumises aux dispositions de l’article L.442-1 du code de commerce, désormais applicable. Cet arrêt a donc toute son importance pour le régime juridique des pratiques restrictives de concurrence.
A noter que par cet arrêt, la Cour de cassation confirme également que les dispositions du code du commerce relatives aux pratiques restrictives de concurrence s’appliquent aux relations de sous-traitance et notamment, aux relations entre un constructeur de maison individuelle et l’un de ses sous-traitants.