Si la transparence représente une opportunité pour les entreprises de renforcer la confiance avec les autorités fiscales, le risque que les données soient mal comprises est réel.
« La conformité est devenue un exercice stratégique, car vous avez une marge de manœuvre, explique Jeff Michalak, EY Global International Tax Services Leader. Vous ne contrôlez pas nécessairement les informations dont disposent les autorités fiscales à votre sujet, mais vous pouvez les replacer dans leur contexte, afin que vos interlocuteurs n’aient pas d’idées fausses sur votre activité et vos comptes. »
Bien communiquer
D’après Ute Benzel, à l’avenir, des systèmes ERP (progiciel de gestion intégrée) s’appuyant sur la technologie cloud feront leur apparition. Plus flexibles, ils ouvriront une nouvelle ère de stockage et d’analyse des données, ce qui permettra aux entreprises de traiter avec les autorités fiscales en « toute transparence ».
La fiscalité deviendra avec le temps un sujet de plus en plus stratégique pour les entreprises souhaitant établir un climat de confiance avec les autres acteurs concernés. Les organisations qui ne pourront pas expliquer leurs données fiscales aux administrations dédiées, à leurs cadres supérieurs et à leur conseil d’administration seront confrontées à des risques financiers et de réputation.
Matt O’Laughlin de l’entreprise PVH affirme qu’il assiste aux réunions du conseil d’administration et qu’il y explique les évolutions importantes pour l’entreprise, qu’il s’agisse du plan d’action BEPS ou de la réforme fiscale américaine. « Mon objectif est de clarifier les choses sans toutefois entrer trop dans les détails, pour que tout le monde ait une vue d’ensemble sur la question. »
Selon Josh Gordon, le groupe IBM bénéficie d’un réseau qu’il construit depuis des décennies dans toutes les juridictions.
« Nous avons très bien expliqué notre activité aux autorités fiscales du monde entier », explique-t-il. « Dans la plupart des pays, nous savons à quoi nous en tenir du point de vue fiscal. Nous n’avons peut-être pas énormément de personnel dans tous les pays, mais nous en avons assez pour remplir nos obligations. »
Le fait d’avoir une équipe sur place, en contact direct avec les entreprises et les autorités fiscales, nous a certainement aidés dans de très nombreux cas.
Identifier les compétences adaptées
De nos jours, les fiscalistes sont de plus en plus « connectés » aux services opérationnels, stratégiques et décisionnels de l’entreprise, alors que la réglementation et les politiques fiscales évoluent. Ils sont par ailleurs en contact étroit avec les autorités fiscales des pays dans lesquels l’entreprise exerce ses activités.
En conséquence, les compétences requises pour travailler dans un service en charge de la fiscalité évoluent. La veille juridique continue desconcernant les lois et les réglementations fiscales, complexes et en évolution, et la capacité à les interpréter restent bien sûr des savoir-faire essentiels pour tout fiscaliste. Cependant, la gestion et l’analyse numériques, ainsi que la communication (avec les conseils d’administration et les acteurs externes concernés), sont en train de devenir des compétences recherchées.
Il est essentiel d’organiser correctement la structure de vos collaborateurs dans le modèle opérationnel. L’accent mis sur la technologie signifie que les nouveaux arrivants doivent avoir un bagage plus technologique qu’autrefois, en plus des aspects techniques.
À l’avenir, les fiscalistes auront de plus en plus besoin de « technologues numériques » capables de comprendre les plates-formes de données et d’identifier les moyens par lesquels l’intelligence artificielle peut prendre en charge le travail fastidieux et améliorer l’identification des passifs.
« Les données sont la première étape, déclare Josh Gordon. À mesure que la robotique et l’automatisation se rapprocheront l’une de l’autre au sein du service en charge de la fiscalité, le mouvement s’accélèrera. Les tâches les moins qualifiées seront de moins en moins effectuées par les équipes, ce qui leur permettra de se concentrer sur la création de valeur au quotidien. »
En ce qui concerne les compétences de communication, le programme BEPS « ouvre un aspect de la fiscalité qui est plus politique et lié aux relations publiques qu'auparavant, déclare Matt O’Laughlin. La clé, c’est la transparence. »
Gérer le risque fiscal : mesures immédiates à prendre
- Dans un monde qui se globalise rapidement, et dans lequel les changements législatifs et réglementaires sont fréquents, les stratégies d’entreprises à plus grande échelle peuvent avoir des conséquences fiscales imprévues. Les cadres dirigeants doivent consulter régulièrement leurs fiscalistes pour comprendre les ruptures, minimiser les risques et, in fine, mettre en œuvre les stratégies d’entreprise en toute confiance.
- Augmentez les investissements dans les services en charge de la fiscalité pour réduire les coûts des processus opérationnels. Renforcez les liens entre les services en charge de la fiscalité, des finances et même des ressources humaines afin de générer des gains d’efficacité et de libérer des ressources destinées à des activités de plus grande valeur.
- Demandez à vos directeurs fiscaux d’identifier les implications et les obligations fiscales et d’analyser les avantages en amont, tels que les incitations, afin de maximiser la valeur.
- Tirez parti de l’analyse des données pour identifier les impacts de la fiscalité sur l’entreprise et montrer aux cadres supérieurs comment elle affecte la stratégie d’entreprise à plus grande échelle. Cela peut permettre de réduire les coûts en plus d’être une source de valeur pour l’entreprise dans son ensemble.
- Préparez vos interventions afin de pouvoir expliquer clairement les données fiscales aux représentants des administrations fiscales, ainsi qu’aux cadres supérieurs et au conseil d’administration. À défaut, l’entreprise pourrait être confrontée à des risques financiers et de réputation.
Ce qu'il faut retenir
Qu’il s’agisse des capacités nécessaires pour exercer efficacement leurs fonctions, de la technologie ou de la réglementation, les fiscalistes actuels doivent faire face à de nombreux changements. Cependant, les fiscalistes qui savent rester « connectés » aux acteurs concernés tout en évoluant au milieu de ces transformations seront en mesure de maîtriser les risques et d’assurer le bon déroulement des activités.